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« Neuroatypique » : des divergences cognitives comme autant de manières différentes d’être au monde

Histoire d’une notion. Parue le 16 mai, la nouvelle édition du Petit Robert accueille cette année 150 acceptions et termes inédits qui rejoignent les 60 000 entrées du dictionnaire. Par leurs usages et leur fréquence, ces nouveaux venus entérinent les préoccupations majeures de l’époque, à commencer par l’environnement, « domaine très productif depuis plusieurs années » selon l’éditorial du dictionnaire, avec l’admission de mots comme « climaticide » ou « agrivoltaïsme ».
Nombreux aussi sont les termes issus du lexique scientifique et médical : aux côtés du « neurone miroir » apparaissent ainsi « neuroatypique » et son antonyme, « neurotypique » – deux adjectifs et substantifs qui attendaient aux portes du dictionnaire depuis 2019. Revenons-en donc aux origines de ce couple notionnel, afin de comprendre au mieux le choix des lexicographes du Robert.
Composé du préfixe d’origine grec « neuro- », renvoyant aux nerfs et au système nerveux, et de l’adjectif « typique », le terme « neurotypique » apparaît le premier. L’équipe du Robert parvient en effet à retrouver sa trace dès 1982 dans l’article « Principes propédeutiques pour les sciences des langages » au sein duquel le biologiste Boris Rybak examine des « protéines neurotypiques ». Il s’agit là de la plus ancienne attestation écrite de l’adjectif. Il faut toutefois attendre un peu plus de vingt ans pour le rencontrer dans son sens actuel, « qui présente un fonctionnement neurologique considéré comme normal », selon la toute récente définition du Robert.
En 2003, l’adjectif est ainsi employé par le psychiatre spécialiste de l’autisme Bruno Gepner dans son article « Relations psychisme-cerveau, dualisme interactionniste et gradient de matérialité » lorsqu’il évoque des « personnes neurotypiques », en glosant aussitôt : « c’est-à-dire non autistes ». Précisément défini dans un contexte médical, l’adjectif peut alors s’extraire de son domaine d’origine, devenant bientôt disponible pour des usages plus courants, mais aussi pour des transformations lexicales.
Et, en effet, on trouve son antonyme à peine trois ans plus tard dans l’ouvrage Le Cerveau nomade (Les Presses de l’université d’Ottawa, 2006), de la psychologue Michelle Bourassa, lorsque celle-ci insiste sur « l’importance de savoir repérer la différence entre une personne neurotypique et une autre neuro-atypique ». Hormis l’orthographe non soudée, l’adjectif « neuroatypique » y est employé dans le sens exact référencé par Le Robert, désignant un être « dont le fonctionnement neurologique diffère de la norme ».
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